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Le « Panthéon imaginaire » de Raphaël Barontini

Panthéon, carte blanche à Raphaël Barontini, drapeaux et bannières pavoisant la partie ouest de la nef principale

Découvrez les figures historiques du combat pour l’émancipation et l’abolition de l’esclavage présentent dans l'exposition « We could be heroes ».

Bannières de l'exposition "We could be heroes"

Sanite Bélair (Haïti)

Suzanne dite Sanite Bélair (v. 1781 - 1802) naît dans l’esclavage vers 1781 à Saint-Domingue dans la commune de Verrettes. Affranchie, elle épouse Charles Bélair en 1796, aide de camp, lieutenant et neveu de Toussaint Louverture. Elle est connue pour ses réussites militaires.

Sanite Bélair participe aux combats contre les troupes du général Leclerc venues reprendre le contrôle de Saint-Domingue sur ordre de Napoléon Bonaparte en 1802. Après que Toussaint Louverture a été forcé de se soumettre à l’ennemi, elle est promue sergente puis lieutenante et ses actions lors des affrontements dans la chaîne des Matheux sont saluées. 

Elle est capturée par la forces françaises à la faveur d’une attaque surprise lors d’un ravitaillement des troupes rebelles. Espérant susciter la clémence du général Leclerc, Charles Bélair se rend à son tour. Le couple de combattants est pourtant condamné à mort, quelques heures après leur arrivée au Cap-Français. Pour justifier cette décision, Sanite est notamment accusée de l’assassinat d’un homme blanc capturé par les troupes de Charles Bélair et soupçonné d’espionnage.

Comme sentence, le tribunal colonial décide que, « considérant le grade militaire de Charles et le sexe de Sanite, son épouse », Charles sera fusillé et Sanite décapitée. Les récits racontent que Sanite a exigé de d’être fusillée comme son mari, en considération de sa qualité de soldate.

L’indépendance d’Haïti est obtenue moins d‘un an et demi plus tard, le 1er janvier 1804. Pour le bicentenaire de cet événement, le portrait de Sanite Bélair est imprimé depuis 2004 sur les billets de dix gourdes haïtienne, la monnaie du pays.

Bannière de Sanite Bélair par Raphaël Barontini
Bannière de Sanite Bélair par Raphaël Barontini

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Dutty Boukman (Haïti)

Avant août 1791, Dutty Boukman (v. 1767 - 1791) vit en esclavage dans une plantation au nord de Saint-Domingue. En raison de sa grande taille et de sa force physique, il occupe des positions de responsabilité, telles que cocher et commandeur, mais dès cette époque il est connu pour des faits de marronnage et de brigandage.

Dutty Boukman est également un hougan, c’est-à-dire un prêtre du vaudou haïtien. C’est dans cette fonction qu’il organise la cérémonie du Bois-Caïman qui se tient la nuit du 14 au 15 août 1791. Ce rassemblement politico-religieux marque le moment déclencheur de l’insurrection des personnes esclaves de Saint-Domingue. Dutty Boukman y ordonne le soulèvement général, fait prêter serment aux conjurés, et s’impose comme l’un de leurs meneurs.

L’insurrection éclate le 22 août 1791. Elle se propage dans toute la Plaine du Nord, mais est arrêtée par les autorités coloniales à Cap-Français (actuel Cap-Haïtien). Dutty Boukman est capturé et exécuté par les forces françaises le 7 novembre 1791. Son corps est brûlé, sa tête est plantée sur une pique et exposée au Cap-Français pour dissuader quiconque de se rebeller à nouveau. Mais il est trop tard : rien ne peut plus empêcher la poursuite de la révolte, qui finit par gagner toute l’île.

Avec son parcours associant sur sa personne à la fois la mémoire du marronnage, l’importance de la religion vaudou et le souvenir des débuts de l’insurrection de 1791, Dutty Boukman est une figure majeure des débuts de la révolution haïtienne.

Bannière : "Le Mars Vaudou – Dutty Boukman"
Bannière : "Le Mars Vaudou – Dutty Boukman"

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Jean-Baptiste Belley (Haïti)

Né au Sénégal sur l’île de Gorée en 1746 ou 1747, Jean-Baptiste Belley (v. 1746 - 1805) aurait été déporté et réduit en esclavage à Saint-Domingue dès ses deux ans. Ces déclarations sont basées sur ses propres-dires ; selon d’autres sources, il serait né dans la colonie, à Léogane, dans l’ouest de Saint-Domingue.  Il aurait ensuite acheté son affranchissement grâce aux revenus de son travail de perruquier.

Devenu « libre de couleur », il possède lui-même avant la Révolution quelques personnes réduites en esclavage, comme beaucoup de personnes de sa condition à cette époque.

Engagé comme militaire, il fait partie en 1779 des « Chasseurs volontaires de Saint-Domingue », une unité composée de colons français et de près de huit cents hommes noirs et métis libres envoyée par la France de Louis XVI soutenir les insurgés contre les troupes anglaises dans la Guerre d’Indépendance américaine. Il participe notamment à la bataille de Savannah (Géorgie). Sa force et sa bravoure lui valent le surnom de « Mars », en référence au dieu romain de la guerre, dont la figure est ici reprise par les épaulettes et la chevelure du personnage, tirées d’une sculpture antique représentant le dieu Mars.

A son retour à Saint-Domingue, Jean-Baptiste Belley est promu « officier subalterne des nègres libres du Cap ». Après 1791, alors que la colonie a basculé dans la guerre civile, il joue un rôle important contre les colons dans la bataille du Cap-Français en juin 1793 aux côtés des commissaires civils Sonthonax et Polverel, qui proclament l’abolition de l’esclavage à Saint-Domingue en août suivant. Quelques jours plus tard, Belley est désigné pour représenter Saint-Domingue à la Convention Nationale. Aux côtés du blanc Louis-Pierre Dufay et du métis Jean-Baptiste Mills, il devient le premier député noir français. Ensemble, ils gagnent la métropole où, après avoir été brièvement arrêtés, ils finissent par rejoindre la Convention nationale, et votent le 4 février 1794 l’abolition de l’esclavage dans toutes les colonies françaises.

Davantage homme d’action qu’orateur, Belley connaît une carrière parlementaire brève, durant laquelle il ne fera que deux interventions à la tribune, dont l’une pour dénoncer les prises de positions du lobby pro-esclavagiste des représentants des colons à Paris. Il abandonne son poste dès 1797, rentre à Saint-Domingue, et devient commandant d’un corps de gendarmerie. Fidèle à la République française, il collabore en 1802 à l’expédition Leclerc ordonnée par Napoléon Bonaparte pour renverser Toussaint Louverture.

Mais Belley est bientôt trahi par le Premier Consul qui, après avoir rétabli l‘esclavage en mai 1802, décide de chasser tous les officiers noirs de l’armée. Renvoyé en France métropolitaine, Belley finit assigné à résidence à Belle-Île-en-Mer où il meurt seul le 5 août 1805 sans jamais avoir été informé des raisons de sa mise à l’index.

La mémoire de Jean-Baptiste Belley est tout de même restée vive, notamment grâce à l’un de ses portraits peint par Anne-Louis Girodet en 1797 dont s’est ici inspiré Raphaël Barontini. Première représentation en Occident d’un homme noir en costume de député, la peinture de Girodet a marqué les esprits, en rompant avec les représentations stéréotypées de personnes noires. Jean-Baptiste Belley y est montré paré de l’écharpe tricolore, incarnant les nouveaux idéaux de la Révolution française, aux côtés du buste de l’abbé Raynal, qui avait critiqué l’esclavage dans son Histoire des Deux Indes avant la Révolution. Girodet, tout comme Barontini aujourd’hui, érigent ainsi Jean-Baptiste Belley en symbole des luttes des personnes noires et métisses pour la reconnaissance de leur liberté et de leurs droits en France.

Bannière : "Le Jacobin Noir".
Bannière : "Le Jacobin Noir".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Cécile Fatiman (Haïti)

Cécile Fatiman (v1771 - v1883) est décrite selon le témoignage d’un de ses descendants  comme « une mulâtresse [terme colonial désignant une personne métisse] aux yeux verts et à la longue chevelure noire et soyeuse ». Fille d’une femme réduite en esclavage et d’un homme qui aurait été un prince de Corse, elle est vendue avec sa mère à Saint-Domingue.

Elle fut l’une des mambos de la cérémonie vaudou du Bois-Caïman dans la nuit du 14 août 1791. La mambo est une prêtresse qui interprète les volontés des lwas, les esprits de la religion vaudou haïtienne. Comme son rôle de prêtresse le prévoit, Cécile Fatiman a procédé au sacrifice d’un porc durant la cérémonie, dont les participants ont ensuite bu le sang. Cet acte, destiné à sceller leur serment de déclencher quelques jours plus tard une insurrection contre le pouvoir colonial, visait à les rendre invulnérables face à l’armée française.

Après l’indépendance haïtienne, elle devient une princesse du royaume d’Haïti lorsque Henri Christophe, le mari de sa sœur, se proclame roi de la partie nord du pays en 1811. Elle sera même première dame de la République d’Haïti en raison de son mariage avec le prince Jean-Louis Pierrot, vétéran de la bataille de Vertières, décisive pour l’indépendance haïtienne, et qui exercera la présidence d’Haïti de 1845 à 1846. Elle se serait éteinte dans la ville de Cap-Haïtien en 1883 à l’âge de 112 ans. C’est le témoignage de son arrière-petit-fils, le général Pierrot Benoit Rameau, recueilli dans les années 1950, qui a permis de retracer son histoire.

Elle est ici représentée vêtue d’une tunique blanche et parée de dentelle, ce qui évoque les tenues portées par les mambos du vaudou haïtien. Le symbole sur sa tunique est le vévé (symbole qui représente un lwa, un esprit vaudou) de Erzulie Dantor, divinité guerrière associée à l’amour et à la maternité par laquelle Cécile Fatiman aurait été possédée durant la cérémonie du Bois-Caïman.

En partie haute de son visage, on peut apercevoir un fragment de fétiche vaudou fon de l’actuel Bénin, pays identifié comme le berceau du vaudou, et lieu de départ de nombreux captifs qui, déportés par la traite esclavagiste, ont emporté avec eux cette culture jusqu’à Haïti.

Bannière : "La Mambo de Bois-Caïman - Cécile Fatiman".
Bannière : "La Mambo de Bois-Caïman - Cécile Fatiman".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Flore Gaillard (Sainte-Lucie

On ne connaît aujourd’hui que quelques éléments de la vie de Flore « Bois » Gaillard, marronne et résistante à Sainte-Lucie au temps de la Révolution. Elle vivait à la fin du XVIIIe siècle en esclavage à Sainte-Lucie. Cette île des Caraïbes située au sud de la Martinique, a longtemps été disputée entre les puissances françaises et anglaises.

En 1793, Sainte-Lucie est sous domination française depuis dix ans. Alors en fuite, Flore Gaillard rejoint un groupe de marrons établis dans les mornes de Sainte-Lucie, au lieu connu aujourd’hui sous le nom de « Fond Gens Libre ». Alors que l’abolition de l’esclavage est proclamée par la République et que le Royaume-Uni tente de ravir le territoire à la France, les marrons de Sainte-Lucie s’unissent à plusieurs groupes de « libres de couleur », de soldats français républicains et d’Anglais déserteurs pour former « l’Armée française des bois », que les Britanniques ne désignent que comme les « Brigands ». Ensemble, ils mènent une guérilla contre les troupes anglaises qui tentent de prendre le contrôle de l’île, et dont la victoire signifie le retour de l’esclavage.

Flore Gaillard serait alors devenue l’une des principales cheffes de ce groupe révolutionnaire, qui parvient à vaincre les Britanniques à la bataille de Rabot en 1795, avec l’aide des troupes françaises républicaines envoyées par Victor Hugues depuis la Guadeloupe et où s’illustre l’officier métis martiniquais Louis Delgrès, qui s’opposera plus tard au rétablissement de l’esclavage en Guadeloupe.

La victoire est cependant de courte durée, car les Britanniques reprennent l’île en 1797, et y rétablissent l’esclavage. C’est à cette époque qu’on perd la trace de Flore Gaillard.

Son souvenir reste vif à Sainte-Lucie, où le piton Flore est ainsi nommé pour lui rendre hommage. Sa mémoire est également préservée par la littérature. Elle est en effet l’héroïne du roman Ormerod (2003) du martiniquais Edouard Glissant, dans lequel il imagine ce qu’aurait pu être sa vie : violée par son propriétaire, elle serait partie en marronnage après l’avoir tué, et aurait été tuée à son tour après la reprise de Sainte-Lucie par les Britanniques en 1797. En inventant une biographie à Flore Gaillard, l’héroïne nationale de Sainte-Lucie, Edouard Glissant a contribué à ériger cette femme en symbole universel du combat pour la Liberté et contre l’esclavage.

Bannière : "Ormerod".
Bannière : "Ormerod".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Joseph Ignace (Guadeloupe)

Joseph Ignace (v. 1770 - 1802) naît dans l’esclavage à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, autour de 1770. Il travaille comme charpentier avant de partir en marronnage dans les hauteurs de l’île. Lorsque l’abolition de l’esclavage est proclamée en Guadeloupe par le gouverneur Victor Hugues, en 1794, il rejoint les troupes républicaines.

Joseph Ignace gravit ensuite les échelons de l’armée jusqu’à être nommé chef de bataillon et commandant du fort de la Victoire de Pointe-à-Pitre en 1802. Lorsque les forces du général Richepance débarquent en Guadeloupe, envoyées par Napoléon Bonaparte pour y rétablir l’ordre ancien, il s’oppose à leur projet. En effet, après son arrivée le 6 mai 1802, le général français donne l’ordre de rassembler les soldats guadeloupéens de Pointe-à-Pitre dans la savane de Stiwenson pour les désarmer, première étape avant l’objectif gardé secret de rétablir l’esclavage dans la colonie. Joseph Ignace fait partie des premiers à refuser d’obéir et s’enfuit à la tête d’un bataillon d’insurgés.

Il se réfugie au fort Saint-Charles à Basse-Terre. Avec ses troupes il tient pendant dix jours avant d’être contraints d’évacuer le fort. Ils se scindent en petits groupes. Tandis que celui mené par Louis Delgrès part en direction de Matouba, le bataillon commandé par Joseph Ignace se dirige vers Pointe-à-Pitre le 22 mai.

En nombre insuffisant pour attaquer la ville et résister à l’offensive française, Joseph Ignace et ses hommes sont pris au piège trois jours plus tard dans la redoute de Baimbridge. Les soldats encore vivants, dont les deux fils de Joseph Ignace, sont massacrés par les forces françaises. Préférant mourir que d’être capturé par l’ennemi, Joseph Ignace se suicide d’une balle dans la tête le 25 mai 1802.

Bannière : "Joseph Ignace".
Bannière : "Joseph Ignace".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Anchaing & Héva (La Réunion)

On dispose de peu d’informations sur Anchaing et Héva, figures majeures du marronnage dans les légendes populaires de La Réunion. Il existe de nombreuses versions de leur histoire, autour d’une même trame les faisant vivre sur l’île Bourbon, actuelle île de la Réunion, durant la première moitié du XVIIIe siècle.

Tous deux réduits en esclavage dans une plantation, ils s’en seraient enfuis pour échapper à l’esclavage et aux violences infligées à Héva par son propriétaire. Ils rejoignent alors l’une des nombreuses communautés de marrons installée dans les cirques et les reliefs montagneux de l’intérieur de l’île.

Tout au long du XVIIIe et du XIXe siècle, une véritable contre-société marronne a existé dans les replis de la géographie réunionnaise, formant un véritable « royaume de l’intérieur » sans cesse menacé par les opérations de répression du pouvoir colonial.

Les récits oraux indiquent qu’Anchaing et Héva ont vécu de longues années en marronnage, parvenant à échapper à l’armée française, et donnant naissance à sept ou huit filles. Les mariages de deux d’entre elles leur auraient permis de tisser des liens avec des chefs influents d’autres sociétés de marrons.

Portée par les poèmes et les légendes, la mémoire du couple d’Anchaing et Héva s’est perpétuée jusqu’à nos jours à La Réunion. La toponymie de l’île porte la trace de cette histoire, puisque le piton où ils se seraient enfuis est maintenant connu comme le Piton d’Anchaing. Ce dernier devient dès le début du XIXe siècle un personnage de la littérature populaire, tandis que la figure d’Héva gagne en importance dans les œuvres les plus récentes. Après être longtemps restée dans l’ombre de son compagnon, elle incarne aujourd’hui un modèle de la femme réunionnaise, libre et révolutionnaire.

Bannière : "Anchaing et Héva".
Bannière : "Anchaing et Héva".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Victoria Montou (Haïti)

Victoria Montou (millieu du XVIIIe siècle - 1805), dite « Toya » ou « Tante Toya » serait née au Royaume du Dahomey (actuel Bénin), où elle apprend les techniques de combat qui lui vaudront sa renommée. Capturée, elle est déportée et mise en esclavage à Saint-Domingue.

Sur place elle est forcée de travailler dans la plantation de café du colon Henri Duclos, avec son probable neveu et futur empereur d’Haïti, Jean-Jacques Dessalines. Toya l’initie au combat au corps à corps et au lancer de couteau et lui parle aussi de ses ancêtres. Le propriétaire de la plantation Duclos se méfiant de ce lien, il décide le transfert de Victoria Montou à l’habitation Déluger, et revend Jean-Jacques à un affranchi noir nommé Dessalines (d’où son nom de Jean-Jacques Dessalines).

Vive et affirmée, Victoria Montou est chargée de commander une cinquantaine de personnes en esclavage sur la plantation. Lorsqu’éclate l’insurrection de 1791 à Saint-Domingue, elle s’engage dans le soulèvement où elle use de tout son talent de meneuse, jusqu’aux combats finaux qui mènent à l’indépendance d’Haïti.

Une fois devenu empereur d’Haïti en 1804 sous le nom de Jacques Ier, Jean-Jacques Dessalines n’oublie pas Toya qui a été si importante pour lui. Il la nomme Duchesse Impériale en 1805.  Lorsqu’elle tombe malade quelques mois plus tard, il s’assure qu’elle reçoive les meilleurs soins. Elle meurt en juin 1805 et sera honorée après son décès par des funérailles officielles. C’est l’impératrice Marie-Claire Bonheur qui conduit le convoi mortuaire, escortée par huit brigadiers de la garde impériale. C’est ainsi que le souvenir de la combattante Victoria Montou a été ancrée dans la mémoire collective haïtienne.

Bannière : "Toya".
Bannière : "Toya".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Claire (Guyane)

Au XVIIe siècle, la France colonise la Guyane et y pratique, à partir de la deuxième moitié du siècle, la traite et l’esclavage. Mais la colonie n’est guère prospère et compte moins de personnes en esclavage que les colonies françaises antillaises.

La géographie du plateau des Guyanes, recouvert de forêts non contrôlées par le pouvoir colonial, est favorable au marronnage, qui s’y développe dès le début de l’esclavage dans la région. Dans cet environnement amazonien, les personnes en fuite établissent des sociétés à l’écart des plantations. La vie y est organisée autour de l’agriculture, de la pêche et de la chasse, selon un mode nomade compte tenu de la nécessité permanente d’échapper aux opérations militaires des colons. Les sanctions en cas de capture sont en effet impitoyables : selon le Code noir, qui règlemente la vie des personnes en esclavage dans les colonies, le marronnage doit être sévèrement puni, par des peines allant de la mutilation à la mort. 

Claire (1700 - 1752) est une femme qui a travaillé en esclavage dans les plantations guyanaises vers le milieu du XVIIIe siècle. Lorsqu’elle s’enfuit, elle rejoint la communauté de marrons de la Montagne-Plomb. Installée à partir de 1742, cette communauté résiste à plusieurs offensives militaires françaises.

En 1752, elle est capturée par les soldats français avec son compagnon, Copéna. Pour dissuader d’autres personnes de s’enfuir en marronnage, ils sont tous les deux exécutés en place publique en présence de leurs enfants. Claire est étranglée et pendue, tandis que Copéna est condamné au supplice de la roue. Mais leur martyre n’a jamais empêché de nombreux autres marrons de gagner leur liberté en faisant communauté. Claire reste aujourd’hui dans la mémoire guyanaise un exemple du marronnage dans les colonies françaises.

Bannière : "Claire, la marronne de la Montage-Plomb".
Bannière : "Claire, la marronne de la Montage-Plomb".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Louis Delgrès (Martinique - Guadeloupe)

Né libre d’un père colon blanc et d’une mère « libre de couleur » en 1766, Louis Delgrès (1766 - 1802) passe ses premières années à la Martinique puis à Tobago, alors colonie française. Eduqué, il devient militaire. Après avoir rejoint la milice de la Martinique en 1783, il est nommé sergent puis lieutenant dans l’armée coloniale. Gagné par les idéaux révolutionnaires et républicains, il participe durant la décennie 1790 à la défense des Caraïbes françaises contre les offensives de l’Angleterre royaliste. Il est fait prisonnier à plusieurs reprises, notamment lors de la bataille de Rabot à Sainte-Lucie en 1795, où a combattu Flore Gaillard et où il est également blessé.

En 1802, il est colonel de l’armée française en Guadeloupe, lorsque Napoléon envoie dans l’île le général Richepance et trois mille cinq cents soldats pour y rétablir l’ordre ancien. Avec d’autres soldats et officiers comme Joseph Ignace, Louis Delgrès soupçonne, à raison, que cette mission a pour véritable objectif le rétablissement de l’esclavage sur l’île. Il décide alors de se rebeller et prend la tête d’un bataillon insurrectionnel à Basse-Terre. 

La lettre que Louis Delgrès tient ici dans sa main évoque la proclamation qu’il rend publique le 10 mai 1802, quatre jours après l’arrivée du général Richepance en Guadeloupe, qui s’ouvre sur ces mots :

“ A l’univers entier

Le dernier cri de l'innocence et du désespoir

C’est dans les plus beaux jours d’un siècle à jamais célèbre par le triomphe des lumières et de la philosophie qu’une classe d’infortunés qu’on veut anéantir se voit obligée de lever la voix vers la postérité, pour lui faire connaître lorsqu’elle aura disparu, son innocence et ses malheurs…”

Rédigée avec l’aide de l’officier blanc créole, Monnereau, placé sous ses ordres, Louis Delgrès exprime son indignation face à la perspective d’un rétablissement de l’esclavage, et revendique le droit des noirs et des métis guadeloupéens à résister à l’oppression pour leur liberté.

Plusieurs semaines de combats s’ensuivent. Les rebelles se réfugient d’abord au fort Saint-Charles (aujourd’hui fort-Delgrès) pendant dix jours, avant de se scinder en plusieurs groupes à travers l’île. Malgré tous leurs efforts, les trois cents hommes du bataillon de Louis Delgrès sont acculés par mille huit cents soldats du général Richepance, le 28 mai 1802. Louis Delgrès et ses hommes décident alors de suivre à la lettre la devise de la Convention, « Vivre libre ou mourir », en se suicidant collectivement, en hommes libres, plutôt que de se rendre aux troupes de Bonaparte. Ils font exploser des barils de poudre dans leur refuge, à l’habitation Danglemont à Matouba, sur les hauteurs de Basse-Terre. Martyr du rétablissement de l’esclavage, Louis Delgrès est, depuis 1998, honoré par une inscription dans la crypte du Panthéon.

Bannière : "À l’univers entier, le dernier cri de l’innocence et du désespoir - Louis Delgrès".
Bannière : "À l’univers entier, le dernier cri de l’innocence et du désespoir - Louis Delgrès".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Installation transept nord

L’installation textile du transept nord a été conçue comme un ensemble et contribue à situer le spectateur au cœur du sujet historique. Cinq œuvres en dialogue la composent.

 

La plus grande pièce, intitulée La traversée, évoque le « Passage du Milieu », c’est-à-dire la traversée de l’océan Atlantique des navires de traite esclavagiste qui déportaient des millions de captives et captifs africains, déracinés, déshumanisés et destinés à l’esclavage dans les colonies européennes des Amériques. Sur la partie gauche de l’œuvre, on peut apercevoir une représentation d’une des plantations les plus anciennes de la Guadeloupe située à Marie Galante.

Vue du transept nord : "Le Marron", "Le Gouffre", "Léwoz", "La Traversée".
Vue du transept nord : "Le Marron", "Le Gouffre", "Léwoz", "La Traversée".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

La traversée est surmontée par une œuvre textile verticale intitulée Le Gouffre évoquant de manière métaphorique la chute dans les abysses de l’esclavage. D’innombrables personnes enfermées dans les cales des navires de traite ont perdu la vie durant le Passage du Milieu en raison des conditions inhumaines du voyage. Certaines se sont suicidées, d’autres sont décédées lors des soulèvements qui arrivaient régulièrement pendant les expéditions. Le personnage qui chute, peint pour la première fois par Théodore Chassériau, est Joseph, le célèbre modèle noir qui fut la référence pour la représentation du corps noir masculin dans les ateliers parisiens de peintres du XIXème siècle, immortalisé aussi bien par David que Géricault. 

 

L’œuvre Le Gouffre est entourée par deux panneaux textiles verticaux évoquant des formes de résistance collectives ou personnelles dans les sociétés esclavagistes.

 

L’œuvre située à sur la gauche, intitulée Le Marron, rend hommage à toutes les personnes réduites en esclavage inconnues qui se sont enfuies pour retrouver la liberté, un phénomène appelé dans les sociétés coloniales le « marronnage ». Dans les montagnes et les mornes des Antilles et de la Réunion ou encore dans les profondeurs de la forêt amazonienne en Guyane, elles ont constitué de véritables contre-sociétés dont l’existence libre aux marges du système colonial reste l’une des formes les plus abouties de la résistance à l’esclavage.

 

Le panneau textile situé sur la droite, intitulé Léwoz évoque les traditions musicales et de danse nées dans la société esclavagiste de Guadeloupe. Centrées autour du tambour (le Ka ou Gwoka), elles s’appuient sur des traditions issues des cultures africaines et ont exprimé tout au long de l’esclavage la résilience et la résistance des populations exploitées. Encore aujourd’hui elles portent cette mémoire dans les fêtes et les carnavals.

 

"Le Gouffre".
"Le Gouffre".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Installation transept sud

La Bataille de Vertières

À la fin de l’année 1801, Napoléon Bonaparte donne l’ordre au général Leclerc et à ses hommes de se rendre à Saint-Domingue afin de reprendre le contrôle de la colonie. L’abolition de l’esclavage y est effective depuis 1793, et consacrée dans la constitution de 1801 rédigée par Toussaint Louverture, qu’elle proclame gouverneur à vie de l’île. Les troupes françaises débarquent dans la colonie au début de l’année 1802. En mai, après deux mois de résistance armée, Toussaint Louverture se rend. Arrêté par traîtrise le mois suivant, il est déporté en France métropolitaine où il est emprisonné sans jugement au fort de Joux, dans le Doubs, tandis que ses officiers se rallient provisoirement à Leclerc.

En Guadeloupe, où Bonaparte a également envoyé des troupes pour reprendre en main la colonie, la résistance des troupes noires et métisses menées par Louis Delgrès et Joseph Ignace est écrasée dans le sang, et l’esclavage aboli en 1794 est officiellement rétabli en juillet 1802. À Saint-Domingue, cette nouvelle unit contre les Français les anciens esclaves et les anciens libres de couleur au sein d’une « Armée Indigène » (sic) commandée par le général Jean-Jacques Dessalines, l’ancien compagnon d’arme de Toussaint Louverture.

Les affrontements font rage pendant encore plus d’un an, suscitant une violence sans limite. Menées par le général Rochambeau, qui a remplacé le général Leclerc mort de la fièvre jaune en novembre 1802, les troupes françaises font usage de chiens de combat mais, affaiblies par la guérilla de l’Armée Indigène, harassées par les maladies, elles s’avèrent incapables de reprendre le contrôle de la colonie. En novembre 1803, elles ne tiennent plus qu’une faible partie du nord de Saint-Domingue, autour de la ville du Cap-Français (aujourd’hui Cap-Haïtien).

C’est le 18 novembre 1803 qu’a lieu l’assaut décisif. Au Fort de Vertières, à l’ouest de la ville où le général Rochambeau et ses hommes sont retranchés. Les assauts sous les boulets de canon se succèdent, sous le commandement de l’officier François Capois qui y gagnera le surnom de « Capois-La-Mort ». Battus, les Français capitulent le lendemain et acceptent de quitter l’île sous dix jours. L’armée la plus puissante du monde a été vaincue par des troupes constituées d’anciens esclaves. Le 1er janvier 1804, la révolution est complète : Jean-Jacques Dessalines proclame l’indépendance de la colonie, et lui redonne son nom d’avant Christophe Colomb, Haïti, événement inouï qui voit l’achèvement de la première révolte servile victorieuse de l’histoire, et qui marque le début de la décolonisation.

Dans les premiers mois de l’indépendance, Jean-Jacques Dessalines ordonne le massacre de la plupart des derniers blancs présents sur l’île. Il se fait couronner empereur sous le nom de Jacques Ier en septembre 1804. Isolé par son autoritarisme, il meurt assassiné par ses généraux deux ans plus tard, alors qu’Haïti reste une nation « marronne », sans reconnaissance internationale.

En effet, ce n’est qu’en 1825 que la France accepte de reconnaître l’indépendance de son ancienne colonie, par une ordonnance du roi Charles X qui impose à la population haïtienne, majoritairement issue de l’esclavage, le paiement d’une somme exorbitante de 150 millions de francs, destinée à indemniser les anciens colons esclavagistes. Finalement ramenée à 90 millions de francs, la somme sera intégralement payée par Haïti, au prix d’un endettement qu’elle n’achèvera de rembourser que dans les années 1940.

Vue d'ensemble (de gauche à droite et de haut en bas) : "Solitude", "Le Triomphe de Toussaint", "La Bataille de Vertières".
Vue d'ensemble (de gauche à droite et de haut en bas) : "Solitude", "Le Triomphe de Toussaint", "La Bataille de Vertières".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Solitude (Guadeloupe)

Solitude (v. 1772-1802) est l’une des héroïnes de la résistance de la Guadeloupe au rétablissement de l’esclavage en 1802. Les seuls éléments historiques que l’on possède sur son existence proviennent d‘un passage de l’« Histoire de la Guadeloupe » publiée en 1858 par l’historien local Auguste Lacour.

C’est de cette histoire que l’écrivain André Schwarz-Bart s’inspirera pour son roman paru en 1972, « La mulâtresse Solitude », où il lui invente une biographie. Son récit contribuera à faire de Solitude un symbole guadeloupéen de la résistance des femmes à l’esclavage.

Selon l’intrigue imaginée par André Schwarz-Bart, Solitude naît en 1772 en Guadeloupe, fille d’une Africaine victime de la traite e et violée par un marin blanc à bord du navire qui la déportait vers les Antilles. Elle est donc selon les termes de l’époque une « mulâtresse », c’est à dire une personne métisse née d’un parent blanc et d’un parent noir. Le roman décrit sa jeunesse dans une habitation esclavagiste, puis sa fuite pour rejoindre une communauté de marrons réfugiés à l’intérieur des terres de la Guadeloupe.

Lorsqu’en 1802 le général Richepance débarque sur l’île pour rétablir l’ordre colonial, de nombreuses femmes participent aux résistances menées par les officiers libres noirs et métis. C’est à ce moment que se déroulent les événements racontés par Auguste Lacour en 1858 : il évoque sa présence active aux côtés des rebelles menés par les officiers métis et noir Delgrès, Ignace et Palerme, et il raconte sa fin tragique : arrêtée alors qu’elle est enceinte lors de l’attaque du camp Palerme, le 23 mai 1802, elle ne sera exécutée que le 29 novembre de cette même année, le lendemain de son accouchement d’un nouveau-né que la décision de Bonaparte condamne à l’esclavage. Solitude est depuis 2022 la première femme noire nommée à être honorée par une statue dans l’espace public à Paris.

"Solitude".
"Solitude".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

Toussaint Louverture (Haïti)

Toussaint Louverture, à l’origine Toussaint Bréda (1743-1803) nait dans la colonie française de Saint-Domingue.  Ses parents étaient des Africains victimes de la traite, de culture Allada (dans l’actuel Bénin). Réduit en esclavage, il passe ses premières années dans l’habitation de Bréda, où il exerce notamment le métier de cocher, plantation dont il tient son premier nom de famille lorsqu’il est affranchi en 1776. Sachant lire et écrire, il s’enrichit, gravit l’échelle sociale de la colonie et devient lui-même propriétaire de quelques personnes réduites en esclavage avant la Révolution, comme de nombreux autres libres de couleur.

Lorsque l’insurrection du Nord de Saint-Domingue éclate en 1791, il fait partie des quelques libres de couleur qui rejoignent les esclaves révoltés, tout en protégeant la famille de son ancien maître. Son nom apparaît pour la première fois à la fin de l’année 1791, lorsqu’il co-signe avec les chefs du soulèvement Jean-François et Biassou une proposition de paix adressée à l’assemblée coloniale.

En 1793, il combat sous les couleurs du royaume d’Espagne, qui contrôle la partie ouest de l’île d’Hispaniola, et qui soutient les esclaves révoltés pour affaiblir la France. Très vite, il se fait remarquer pour ses qualités de tacticien et d’organisateur et son sens politique et diplomatique, qui lui valent le nom par lequel il sera désormais connu : « Louverture ».

Méfiant à l’égard des Français, dont il doute de la volonté de préserver la « Liberté Générale » après l’abolition proclamée par les envoyés de la Révolution Sonthonax et Polverel en août 1793, il ne ralliera la République que lorsque la Convention nationale à Paris votera officiellement l’abolition de l’esclavage, le 4 février 1794. Il se retourne alors contre ses anciens parrains espagnols et rejoint les troupes françaises avec ses quatre mille soldats.

Il enchaîne alors les succès militaires. En 1796, il est nommé lieutenant-gouverneur, puis commandant en chef de l’armée de Saint-Domingue en 1797. Après avoir défait les Espagnols en 1795, il chasse les Britanniques de la colonie, et conquiert l’est de l’île, qu’il unifie au nom de la France. Après avoir écarté tous ses rivaux, qu’il s’agisse des envoyés de la République ou des leaders des anciens libres de couleur auxquels l’oppose une dure guerre civile à la fin des années 1790, il est au début du XIXe siècle le maître absolu de Saint-Domingue.

En 1801, il fait rédiger une Constitution qui consacre l’abolition de l’esclavage, qui affirme l’autonomie de la colonie dans la République française et qui le désigne gouverneur à vie de la colonie. Ce tour autoritaire qu’il donne à son pouvoir s’observe également dans ses décisions économiques : parce qu’il ne voit pas d’autre voie de développement pour Saint-Domingue que celle des grandes plantations exportatrices, il impose des formes de travail forcé aux cultivateurs émancipés depuis 1793 et réprime durement les résistances que ces décisions provoquent.

Son règne ne sera que de courte durée. Voyant d’un mauvais œil l’autonomie prise par Saint-Domingue avec sa nouvelle Constitution, et désireux de reprendre en main la colonie pour pouvoir déployer le grand projet d’expansion coloniale aux Amériques qu’il caresse après avoir secrètement repris la Louisiane à l’Espagne en 1800, le Premier Consul Napoléon Bonaparte décide fin 1801 l’envoi à Saint-Domingue d’un corps expéditionnaire de plus de vingt mille hommes commandés par son beau-frère le général Leclerc. Ce dernier est chargé de réaffirmer la souveraineté française sur l’île, pour à terme y rétablir l’esclavage.

Dans un premier temps, la mission est accomplie : après une résistance de deux mois, Toussaint Louverture dépose les armes et accepte d’être assigné à résidence. Mais le 7 juin 1802, il est trahi, arrêté et déporté en France. Séparé de sa femme et ses enfants, il est emprisonné sans jugement dans une cellule de détention au fort de Joux dans le Doubs. Napoléon Bonaparte ne répond pas aux lettres qu’il lui envoie depuis sa cellule pour justifier ses actes et demander les raisons de sa dégradation.

Très vite, il est affaibli par la faim et le froid extrême qui règne dans cette partie de la France où l’on compte les hivers le plus froids. Il meurt seul, le 7 avril 1803, sans avoir revu, ni sa famille ni Saint-Domingue, qui prend son indépendance neuf mois plus tard.

Général de la République française et héros de la Révolution haïtienne, dont il ne connaîtra pas l’issue, Toussaint Louverture est honoré depuis 1998 par une inscription dans la crypte du Panthéon, qui célèbre : le « Combattant de la Liberté, artisan de l’abolition de l’esclavage, héros d’Haïti mort déporté au Fort de Joux en 1803 ».

 

"Le Triomphe de Toussaint".
"Le Triomphe de Toussaint".

© Benjamin Gavaudo / Centre des monuments nationaux - Droits d’auteur(s) : Raphaël Barontini - ADAGP

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